Pétrissage de l’argile : une pratique souvent négligée

Pétrissage de l'argile

Autant vous prévenir tout de suite, le pétrissage de l’argile est une pratique souvent négligée car ce n’est pas la partie la plus gratifiante du travail du céramiste. Mais dans le métier de céramiste il y a des gestes indispensables à connaitre et si on oublie l’étape du pétrissage, on va avoir toutes sortes de difficultés par la suite : des fissures, des brisures, des pièces tournées qui s’écroulent…et tout cela parce que la terre a été mal préparée. Vous voulez obtenir une terre malléable et facile à travailler ? Lisez cet article jusqu’au bout.

À quoi sert le pétrissage de l’argile ?

Pétrir l’argile sert à faire sortir les bulles d’air et à bien organiser les microparticules qui composent la terre. Travailler cette matière va nous rendre plusieurs services : homogénéiser la terre qui n’est pas complètement à la même consistance, rassembler des morceaux de terre épars, mélanger des terres de couleurs différentes, teinter une terre, etc. Attention ce n’est pas une technique pour réintégrer un morceau sec dans une terre meuble (sauf si vous ajoutez de la chamotte). Le risque est alors est de fragiliser toute la pièce finale.
Maintenant nous allons voir les étapes de préparation qui permettent un pétrissage de l’argile efficace et agréable. Le pétrissage n’a pas à être une corvée !

 

Comment pétrir l’argile facilement ?

La préparation

La terre arrive souvent en pain rectangulaire dans un sac en plastique. Avant d’ouvrir le sac, je la frappe au sol. J’essaie de la frapper dans un coin exempt de poussière d’argile au sol pour des raisons de sécurité, on ne veut pas que la poussière vole partout.

four à céramique - défournement sécuritaire

Découvrez l'article sur la santé et la sécurité

Frapper la terre va permettre de l’assouplir énormément. L’argile est composée de petites plaquettes hexagonales microscopiques qui glissent les unes contre les autres d’autant plus facilement qu’elle est humide. Si vous voulez en savoir plus sur la structure de l’argile, wikipedia vous l’expliquera très bien En frappant le sol, le pain d’argile gagne en plasticité car les plaquettes se déplacent les unes contres les autres et la structure de la terre évolue.

La posture

Je mets toujours un pied devant l’autre en me plaçant face à la table. C’est le bon moment pour se détendre et prendre une bonne respiration ! J’évite de me raidir ou de trop me pencher. D’où le choix d’un plan de travail adéquat.

Le plan de travail

Je choisis un plan de travail dégagé d’outils, de bacs d’eau, d’obstacles ou de pièces des collègues qui pourraient chuter (hé oui ça arrive plus souvent qu’on le pense 😀. Idéalement la table de pétrissage est recouverte d’un tissu solide en coton et elle est fixée au sol, ou suffisamment lourde pour ne pas bouger. Avec une structure adaptée à votre hauteur pour éviter de trop se courber.

Si la terre est légèrement trop dure, on vaporise un peu d’eau sur le canevas. Juste un peu, sinon vous allez patiner !

Le truc quand on débute : on n’a pas envie d’investir de suite dans une table de pétrissage du commerce ? Qu’à cela ne tienne. On peut recouvrir une planche avec de la toile et la caler contre un objet fixe ou un mur afin qu’elle ne glisse pas.

L’avantage : c’est facile à laver et à ranger et on peut avoir des planches à pétrir différentes selon les couleurs de terre qu’on utilise. On veut éviter de mélanger les terres de couleurs différentes et de les contaminer.

 

Méthode de pétrissage de l’argile en tête de bélier

Façonner une boule d’argile d’environ 450 gr en la tapotant énergiquement entre vos mains. Passez la d’une main à l’autre pour la tasser de tous les côtés.
Placer la boule sur le canevas, les 2 mains près des bords, les doigts à l’arrière en serrant la boule.

On fait rouler la boule vers soi. puis on pousse horizontalement. On n’ écrase pas la terre vers le bas, avec le poids du corps. Le bon mouvement consiste à repousser la terre loin de soi.

Puis on la fait juste rouler entre ses 2 mains vers soi. La base de la boule n’a pas changé de place ! Elle est retenue par le canevas.

Et on recommence le même geste. On pousse, on ramène, on pousse, on ramène. Combien de fois me direz-vous ? Idéalement 50 fois. Oui c’est beaucoup ! Mais ça va vous permettre d’apprendre le geste, et vous serez sûr qu’il n’y pas de bulles d’air.

 

Les erreurs du débutant

Trop pousser dans la terre

Au départ on pousse trop et l’argile s’échappe sur les côtés, sous les mains ou entre les doigts. Cela ressemble davantage à un guidon de vélo ou une crêpe qu’à un bélier ! Vous n’avez pas besoin de forcer, allez-y doucement !

Mal positionner ses mains

Observez-vous, revoyez le positionnement de vos mains qui enserrent la terre sur les côtés. Il n’est jamais bon de se presser en céramique. Tapotez les côtés pour retrouver la forme du bélier et prenez votre temps.

Épuiser sa terre

En pétrissant trop, vous épuisez la terre, qui va commencer à sécher, alors reprenez plutôt une autre boule et recommencez.

Pétrir une terre trop sèche ou trop humide

Vous allez vous épuiser, ou glisser en même temps que la boule ! Et faire beaucoup de bouette, comme on dit au Québec. C’est-à-dire une petite boue collante qui va vous gêner et même parfois sécher et glisser des particules dans votre argile.

Prendre trop de terre

Plus tard nous verrons le pétrissage de l’argile en spirale qui permet de pétrir de plus grosses boules d’argile et de gagner en efficacité. Mais commencez par maîtriser le pétrissage de l’argile en tête de bélier avec 400/500 grammes de terre.

 

L’étape finale : ramasser la terre

Vous êtes arrivé au bout, bravo ! Ramenez doucement par petits coups la terre sur elle-même en réduisant le mouvement jusqu’à obtenir une boule (ou une forme compacte ! ). Ce geste évite d’emprisonner de l’air à l’intérieur à la dernière étape.

 

Vérifier son geste

Pour savoir que vous progressez, déchirez votre boule en 2 et observez l’intérieur, vous y trouvez des vides ? C’est qu’il y a encore du travail !

La deuxième façon de s’en rendre compte est au moment de tourner vos pièces, les bulles d’air vont réapparaître lorsque vous ouvrez ou montez vos pièces. Retournez aux gestes de base et tout le reste sera bien plus facile !

 

Ce qu’on peux retenir de cet article : la préparation de l’argile à l’ouverture du sac, la table de travail, la posture, la sécurité, la position des mains, une technique adaptée à la terre, et la qualité de celle-ci doivent être observés pour un bon pétrissage.

Comme le prouvait la tortue de la célèbre fable de La Fontaine :
“Rien ne sert de courir, il faut partir à point.”
et j’ajouterai : pour obtenir un beau bélier !

Maintenant à vous de jouer ! Vous avez des difficultés ? Laissez-moi un commentaire ci-dessous 👎, je serais ravie de vous aider. Si vous connaissez déjà cette technique de pétrissage, pourquoi ne pas revoir vos gammes, vous aurez peut-être des surprises !


8 Replies to “Pétrissage de l’argile : une pratique souvent négligée”

Claire

Bonjour Emilie,
Merci beaucoup pour ton site plein de conseils, c’est précieux quand on commence en autodidacte et qu’on a peur de faire des fautes! Surtout l’article sur la sécurité est précieux!

J’aurais deux petites questions à te poser:
– Existe-t-il une bonne vidéo où on peut voir les bons gestes pour le pétrissage? C’est parfois plus facile à comprendre que les mots.
– Est-ce qu’il y a des précautions à prendre avant de laver ses habits d’atelier à la machine? Les résiduts d’argile ne sont-ils pas nocifs pour la machine et/ou l’environnement (bien que naturels)?

Merci pour tes réponses et désolée si la deuxième question est un peu hors-sujet ici. Je ne savais pas bien où la poser.

Bonne semaine!
Claire

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Bonjour Claire,
– La vidéo sur le pétrissage sera dans ma future formation. J’y travaille 😉 Je sais que ça n’est pas évident au début !
– Je ne met jamais mes tabliers et vêtements de travail dans la même brassée que mes vêtements réguliers. À ma connaissance les résidus d’argile ne posent pas de problème ni pour toi ou ni pour l’environnement. Par contre il y a d’autres matériaux qui ont une certaine toxicité dans un atelier. Par exemple je travaille souvent avec des pigments purs.
Pas de problème pour le hors sujet. Mais si tu veux en savoir plus sur la toxicité tu peux lire cet article : https://neo-ceramistes.com/poteries-toxiques/

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Florence

Merci Emilie pour ce site plein de super conseils, que je découvre petit à petit avec beaucoup de plaisir!

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Charoy

Bonjour,

Conseillez vous de fixer le tissu à la planche en l’agrafant par ex, ce qui permet qu’il ne bouge pas mais ne permet pas de le laver. Ou de le coincer sous la planche le temps de pétrir pour pouvoir le laver?

Merci!!!

Marion

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Bonjour Marion, moi je fixe le tissu avec des agrafes et je le nettoie à grand eau. Il ne faut pas que l’argile glisse sur la planche quand on pétrit.

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Cécile

Bonjour, merci pour ce blog très utile et bien fait ! Pourriez-vous montrer le pétrissage en tête de bélier et les gestes avec quelques photos ?

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PANO

Je ne fais que commencer mon apprentissage et effectivement la tendance et à passer tout de suite au modelage en oubliant de bien traiter sa terre !
Merci du rappel ET de la technique car je m’épuisais a taper sur la boule.

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